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Tutoriaux

Faire une photostory : ma méthode.

Je présente ici ma recette en toute humilité ; ce n'est ni un exemple à suivre ni la seule façon de procéder qui existe, loin de là, juste un ensemble de remarques sur quelques étapes que *je* suis pour faire mes romans-photos. Ne vous attendez pas à des scoops, je pense que tout le monde fait plus ou moins comme ça...

Sommaire :

  1. Le matériel
  2. La prise de vue et le tri des photos
  3. Le recadrage et l'importance de varier la composition
  4. Le traitement des images
  5. La mise en valeur du texte
But de l'opération : faire, choisir et éditer des photos qui "donnent vie" aux personnages.
Comment s'y prendre ?
  1. Le matériel utilisé

- un appareil photo numérique
- de la lumière pas trop naze
- un PC
- un logiciel de traitement d'images
- optionnel : une tablette graphique
... et un peu de patience et d'expérience.

  1. La prise de vue et le tri des photos

- Bon, déjà mes poupées ça fait plusieurs années que je les ai et que je les photoshoote comme une dingue, donc à force j'ai appris à les poser et à tirer parti de leur visage => de l'intérêt de s'entraîner !
Par ailleurs j'ai délibérément choisi des moules assez versatiles et probablement plus faciles que d'autres à mettre en scène.

- Jamais de flash. Ça écrase et ça fige tout ; de plus la résine réfléchit très bien la lumière alors ça "brûle" souvent les détails du visage tout en assombrissant les fonds => à éviter, vraiment.
Si la luminosité n'est pas bonne, soit je remets la séance à un autre jour, soit j'utilise un trépied.

- Quand je prends une photo pour une certaine scène je ne la prends jamais en UN exemplaire, je prends entre 2 et 10 fois à peu près la même mais sous des angles un peu différents, avec un réglage parfois différent, une position de tête un peu modifiée etc... bref, pour ce qui va donner une case, en moyenne j'ai 5/6 clichés pas tous rigoureusement identiques.

Exemple : arrivée de Manji sur scène dans la photostory 58 (Day of Gloom.) Il est censé être énervé contre Aaron et arriver avec un air de colère rentrée. Voici deux photos prises pour ce moment :

A

B

Manji a presque la même position mais dans la A il est à hauteur de regard avec la tête tournée vers la lumière, alors que dans la B il est en très légère plongée et la lumière vient du côté. Dans la photo A il a plutôt l'air rêveur, au mieux un peu excédé genre "je lève les yeux au ciel", ça ne va pas. Dans la B il regarde son "adversaire" en face avec l'ombre des cils qui lui donne un regard plus sombre et la lumière de biais qui accentue les traits du visage, ça correspond mieux.

Je choisis donc la B. Un coup de contraste et quelques bulles plus tard, résultat :

J'ai dû augmenter la dose récemment, parce que j'ai un reflex maintenant - ce qui est une tuerie pour faire de belles photos, mais qui a le désavantage de ne pas proposer de preview en temps réel. Je mitraille et fais donc un premier tri sur le vif, avant même de les importer sur mon PC.

- ... et celles que j'importe, je les trie sans pitié. C'est valable pour les sessions de photos simples comme pour les photostories : si le visage des poupées a l'air bizarre ou une expression de poisson mort, je jette. Autant ça m'éclate de les tourner en ridicule, autant j'essaie d'éviter qu'ils soient gratuitement moches sur les photos.

- en revanche je ne jette pas forcément celles où ils ont une expression sympa mais où un truc bugge ailleurs dans la photo (typiquement : gros pied boudiné de Solkee qui dépasse sur la scène, fringues pas en place, perruque qui se fait la malle, détail à la con dans le background...) Parfois je garde et je recadre, ou j'utilise une bulle comme cache-misère.

Exemple : Foot of doom + portable qui traine par terre


Après recadrage :
Bye bye le pied et le portable, et j'ai aussi recadré en haut pour réduire la région en haut à gauche pleine de bazar, au passage.

=> Pour résumer, je prends par exemple 300 à 400 photos, après un premier tri en continu sur l'appareil j'en importe 200, deuxième tri j'en garde 100, et là-dessus en moyenne y en a peut-être 30 à 50 qui me serviront vraiment dans la story.

Pour les histoires les plus longues, je fais plusieurs séances.

  1. Le recadrage et l'importance de varier la composition

Oui, on va reparler du recadrage, parce que c'est important (je trouve.)
Pour une story on essaie du mieux qu'on peut de mettre les photos en scène comme on le ferait pour une BD ou un film, avec des plans, des angles, des zooms différents et adaptés à "l'émotion" qu'on souhaite faire passer. Pour cela, il ne faut parfois pas hésiter à couper tout un bout de la photo pour concentrer l'attention du spectateur sur le détail sur lequel on veut communiquer.

Le recadrage est d'autant plus important pour moi que
1- je ne suis pas une as de la compo spontanée, et
2- comme la plupart des gens, je n'habite pas exactement le château de Versailles : je n'ai qu'un ou deux coins dans mon appart où installer mes résineux avec à la fois un décor assez neutre, une lumière potable et assez de place pour tous les mettre, donc forcément ma liberté de mouvement est assez réduite ; et les angles aussi, vu que la lumière vient d'une seule source et que les photos en contre-jour ça ne passe pas pour n'importe quoi.

Exemple :

Sur cette photo je veux mettre l'accent sur l'énervement de Naqi : pour cela je coupe un peu le haut du visage (ce qui me permet de casser aussi un peu le petit côté Conehead des DoT...) pour renforcer l'effet "on ne voit pas ses yeux assombris par la rage", et au passage ça me permet d'occulter aussi le boxon qu'on voit derrière - sinon je l'aurais éventuellement flouté.
Pour équilibrer la photo je recadre aussi en bas, d'autant plus que la photo est en plongée et donc que le raccourci avec leurs jambes maigrelettes donne vite une impression de crevette hydrocéphale...

=> Il est important de varier les plans et la composition des images pour rythmer le récit et éviter les répétitions ennuyeuses. Quand on ne dispose pas de moyens de mise en scène faramineux, il est souvent utile de retailler les photos après coup.

  1. Le traitement des images

- Je l'avais déjà expliqué je ne sais où mais pour mes photostories, il y a finalement assez peu de post-prod sur les photos : pas la peine d'avoir ni une tablette ni une maîtrise de ouf de l'outil pour faire un truc potable, ce dont je me sers le plus là-dedans c'est le recadrage, et je le fais à la souris.

En routine je colle aussi un coup de contraste automatique, parce que j'aime les couleurs qui claquent et que le contraste rend parfois les choses plus "lisibles", et éventuellement je me sers de trucs plus sophistiqués comme les masques de fusion, très ponctuellement, quand je veux absolument utiliser une photo pas terrible à la base.

Ce n'est que très exceptionnellement que je trafique un peu l'expression des poupées pour en faire ce que je veux ; ça n'arrive quasiment jamais. Pas parce que je trouve ça inintéressant, mais parce que comme on l'aura remarqué, des photos j'en fais en quantité industrielle, alors je n'ai pas vraiment le temps ni le courage de mettre des effets spéciaux sur leurs visages. J'ai pris le parti de laisser leurs visages le plus possible "au naturel" pour gagner du temps, et en contrepartie je suis obligée de prendre énormément de photos pour en avoir une seule qui convient, c'est une stratégie comme une autre.

- Bédéisation. Je suis venue aux BJDs par la BD, et je continue à en utiliser les codes : formes des bulles, choix des polices, traits de mouvements, petits codes graphiques façon manga... tout ça contribue à donner vie à des personnages et casse efficacement l'impression qu'ils sont statiques et figés, parce que les lecteurs en ont déjà intégré ces codes depuis longtemps - si je mets par exemple juste un petit trait ciculaire autour de la tête d'un perso, on voit instinctivement le mouvement "il détourne la tête" même si bien sûr la poupée est aussi mobile qu'un bloc de marbre.

Exemple :

Cette photo est déjà assez "parlante" en soi, mais les petits traits blancs concrétisent le mouvement, et la bulle en pointillés avec la police plus claire indiquent que Lei parle plus bas.

Sur la photo de l'arrivée de Manji utilisée précédemment on voit que la colère est exprimée par la police en gras et les bulles qui se chevauchent, indices qu'il lève la voix et coupe la parole de son interlocuteur.

Sur la photo avec Naqi utilisée aussi avant, les "veines qui popent" sur sa tête, grand classique des mangas, indiquent aussi qu'il perd patience... bref des exemples il y en a foison.

=> Je pourrais me servir d'autre chose que Toshop pour tout ça, mais il me permet d'automatiser beaucoup de choses (redimension, les bulles, mes formes de brosse pour rajouter des petits mouvements etc.) donc il est bien plus pratique pour moi d'utiliser cet outil plutôt qu'un autre.

  1. La mise en valeur des textes

Encore une fois, mon truc à la base c'est la BD, donc c'est assez naturellement que j'ai adopté le parti-pris d'intégrer mes textes directement aux photos dans des bulles (on peut aussi choisir de placer le texte sous les photos.)
Il y a quelques règles simples mais à respecter pour permettre une lecture fluide des textes sous cette forme :

  • Les bulles se lisent de gauche à droite et de haut en bas. C'est dans cet ordre que le lecteur les parcourra, il est donc impératif de les placer de telle sorte qu'il lise les répliques dans l'ordre.
  • Il n'est pas obligatoire de placer la bulle juste à coté du personnage qui parle ; concernant le choix de l'emplacement des bulles, la priorité doit aller à l'ordre de lecture, quitte à faire une "petite queue" de bulle plus grande pour indiquer que la bulle concerne un personnage plus loin. Certains s'affranchissent de cette contrainte en attribuant une couleur de police ou une forme de bulle distinctes pour chaque personnage ; c'est une solution pratique mais qui peut vite se révéler fastidieuse s'il y a plus de 3 ou 4 personnages, tant pour l'auteur que pour le lecteur qui doit mémoriser le code.
  • Choisir une police lisible : adapter la taille, éviter l'italique systématique ou les polices tarabiscotées qui rendent la lecture pénible, et si on écrit en français, choisir une police avec accents.
  • Attention à l'orthographe. Des répliques pleines de fautes donnent l'impression que le personnage est un peu attardé sur les bords, et on l'imagine spontanément parler avec une voix de débile : c'est contrariant mais c'est comme ça. Pensons également au confort de lecture des gens qui maîtrisent à peu près la langue, et que chaque faute perturbe (eh oui). Pour éviter de ridiculiser les persos et d'excéder le lectorat, il est donc conseillé de faire un effort particulier sur l'orthographe des textes. De nos jours, la plupart des traitements de texte dénichent le plus gros des fautes et des coquilles ; si ça déjà c'est éliminé, on ne se crispera pas s'il manque un accent circonflexe à un imparfait du subjonctif...
  • Adapter le niveau de langage ? Les bulles contiennent en général des répliques "parlées". On peut choisir de tenir compte du fait qu'à l'oral on s'autorise plus d'approximations qu'à l'écrit, et retranscrire cette liberté dans les dialogues : un "je ne sais pas" ne sonne pas pareil qu'un "chais pas", de même qu'un "de toute façon je m'en tape" et un "t'façon j'm'en tape". C'est au choix de chacun, mais ça n'autorise pas de laisser tomber l'orthographe pour autant, ok ? (comment ça "l'ortographe tte fasson jmen tapes" ?)
  • Aérer les bulles. Essayer de faire en sorte que les bords de la bulle ne collent pas trop au texte, et disposer celui-ci au centre de la bulle, si possible en évitant les séparations au milieu des mots.

=> Quel que soit le parti-pris narratif, il faut s'efforcer de préserver la logique de l'action décrite et le confort de la lecture.

Voilà pour mes modestes conseils. À toi de jouer maintenant.

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